lʼart dʼescargoter
Le rugby à XIII : Une histoire de rebonds
Après un an de retard, pour cause de pandémie, la prochaine Coupe du monde de Rugby à XIII (un sport appelé Rugby League dans les pays anglophones) se tiendra en Angleterre (l'un de ses fiefs) du 15 octobre au 19 novembre 2022.
Cette nouvelle édition nous offre la possibilité de partir à la découverte ou à la redécouverte d'un sport assez méconnu dans notre pays, excepté dans quelques coins bien spécifiques du territoire. Un sport où l'équipe d'Australie règne presque sans partage depuis fort longtemps (onze titres à son actif en quinze éditions !). Si le rugby à XIII est présent dans une quarantaine de pays, il n'est réellement un sport de masse qu'en Angleterre et dans l'hémisphère sud.
Rugby à XIII et lutte des classes à l'anglaise
Comme bon nombre de sports collectifs, le rugby est né en Angleterre, plus précisément à Huddersfield, dans le Yorkshire, en 1895. Dans ce pays, les origines du rugby à XIII puisent leurs racines dans un profond clivage nord/sud et aristocrates/ouvriers encore marqué de nos jours. Il est le seul sport britannique qui n'est pas issu de la classe dominante.
Créée en 1871 pour codifier ce sport balbutiant, la Rugby Football Union (RFU), dominée par les aristocrates, défend un amateurisme "de classe" en refusant que les clubs du nord industriel de l'Angleterre paient à leurs joueurs ouvriers les journées de travail perdues.
Dès 1895, des équipes de la région de Leeds et de Manchester font sécession en créant la Northern Rugby Football Union, ancêtre de l'actuelle Rugby Football League, qui fait passer en 1906 le nombre de joueurs à 13, avec deux avant en moins. Plus d'un siècle plus tard, le nord de l'Angleterre reste le bastion européen de la discipline. On parle même de l'autoroute M62 comme celle du rugby puisqu'elle relie les principaux clubs de l'élite. Ce qui donne lieu à des derbys acharnés.
Le rugby à XIII en France : un nouveau catharisme...
Certes le rugby, de façon globale sans distinction entre XIII et XV, est implanté sur tout le territoire national, mais il reste globalement associé au sud de la France et au sud-ouest en particulier. Ne parlait-on pas, il y a quelques années en arrière de « rugby cassoulet » ? C'est dans cette partie du pays qu’il a trouvé un terrain favorable à son développement et donné lieu à l’émergence d’une véritable culture du rugby.
S'il existe une géographie « quinziste », il existe aussi une géographie « treiziste », encore plus spécifique que la première. A l'exception du Vaucluse plus à l'est, c'est essentiellement dans les départements des Pyrénées-Orientales, de la Haute Garonne, du Tarn que se concentre l'élite etl a masse des licenciés. Mention spéciale pour l'Aude avec trois club sur neuf que compte la première division, ce qui en fait le premier département treiziste de France.
Si le rugby à XIII appelé aussi « néo rugby » ne put se développer normalement, c’est en partie dû au fait qu’il fut considéré dès son apparition comme une sorte de schisme. Ses initiateurs étaient considérés comme les « nouveaux hérétiques » portant avec leur démarche atteinte aux tenants de « l’orthodoxie quinziste ». Le rugby à XIII s'étant développé en partie sur d'anciennes terres habitées par les « bonhommes et les bonnes femmes » , on parla peut être un peu exagérément de nouveau catharisme !
Longtemps maudit, ce sport fut tout simplement interdit durant la Seconde Guerre mondiale sous le régime collaborationniste du maréchal Pétain. Son purgatoire se poursuivit même au delà, avec interdiction de s’appeler rugby à XIII mais « jeu à XIII », terme on-ne-plus abscon. Cette mesure arbitraire prit fin en 1993, c'est à dire hier...
L'autre explication de la confidentialité du néo rugby en France, c'est son rendez-vous manqué avec la télévision, à la fin des années 60 et 70.Tout le contraire de ses homologues australiens ou anglais (surtout dans le nord du pays), qui réalisent à chaque match des cartons d'audience.
Rugby à XIII ou à XV ?
Rappelons en premier lieu que le rugby est l'un des seuls sports avec deux variantes (et même trois si l'on compte le rugby à sept, la seule discipline olympique). Au delà du nombre de joueurs différents, sans rentrer dans de vaines querelles entre quinzistes et treizistes, les spécialistes s'accordent à dire que le rythme est plus effréné à XIII qu'à XV. Cela grâce à l'absence quasi-totale de phases statiques et un jeu au pied réduit à la portion congrue, ainsi que la suppression des mêlées ouvertes, et des mêlées fermées à six joueurs qui remplacent les touches.
L'histoire du rugby à XIII nous montre combien cette discipline - pas toujours disciplinée, aux yeux de certains - caractérisée par une géographie particulière a su rebondir. Quoi de plus naturel pour un sport basé sur le mouvement perpétuel !
Pour aller plus loin : https://www.ffr13.fr/
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