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  • Antoine Lefranc

Iles Chausey : Paysages et crustacés

Ne vous aventurez surtout pas à les dénommer « îles anglo-normandes » : les îles Chausey sont les seules îles de la Manche qui ne sont pas tombées dans l’escarcelle de la couronne britannique au cours des siècles !


Il faut dire qu’il serait dommage de concéder à nos ennemis saxons préférés cet archipel d’îles, petite merveille de la nature, situé à 17 kilomètres au large de Granville. La ville peut ainsi se targuer de posséder le plus grand quartier insulaire d’Europe.


Grâce aux nombreuses liaisons quotidiennes depuis le port de Granville, vous voici rendus en moins d’une heure sur la plus grande île de ce puzzle minéral. Si la chance vous sourit, vous aurez même le droit d’être escortés par quelques dauphins gris des îles, qui s’amuseront à vous ouvrir le chemin à coups de bonds hors de l’eau.



Le ponton de bois qui permet l’embarquement et le débarquement des insulaires d’un jour témoigne que les îles Chausey sont soumises aux plus fortes marées du vieux continent : le ponton est constitué de deux étages, l’un pour la marée haute, l’autre pour la marée basse, distant de douze mètres !


« Cinquante-deux îles à marée haute, trois cent soixante cinq à marée basse », se plaisent à raconter les autochtones. Mais ne perdez pas votre temps à décompter froidement tous ces îlots pour vérifier les prétentions de la légende : il y a trop de panoramas magnifiques pour cela.




Sur la grande île de quarante-cinq hectares, on commence par se perdre dans un petit bocage normand et on se prend à rêver d’habiter dans une de ces jolies maisons de marins aux pierres blanches avec chacune son enclos délimité par de simples murets.


En faisant le tour de l’île le long de sentiers étroits, on tombe tour à tour sur une petite chapelle, un phare et un fort militaire, réhabilité en 1920 par l’industriel Renault, tous construits avec le granit des carrières de l’île. Ce même granit servit à bâtir l’abbaye du Mont Saint Michel, mais également les quais de Londres, et même de paver certains trottoirs de Paris ! Mais les quelques 500 carriéristes qui vivaient là au XIXème siècle ont depuis longtemps quitté l’île : seuls une dizaine de pêcheurs y vivent à l’année, comme en témoignent les nombreux paniers à homards disposés près de l’embarcadère.



Les eaux pures de Chausey, continuellement brassées par les forts courants marins abondent en effet en délices maritimes : la pêche des fameux homards, bouquets, congres et bars assurent la subsistance des habitants de l’île. N’espérez toutefois pas pouvoir vous procurer ces douceurs auprès des pêcheurs : la totalité de la pêche file directement dans les cuisines de restaurants gastronomiques de France et de Navarre !


Mais voilà que la marée descend, et les canots chausiais, petites embarcations typiques de l’île s’échouent sur le sable. La surface de l’île accessible à pied est démultipliée : à vous les multiples criques dissimulant dans leur sable de splendides coquillages aux couleurs exotiques. L’eau est fraîche, la joie est pure.



Si vous continuez votre ballade, vous n’allez pas tarder à apercevoir des rochers sculptés par les marées et érodés par le sel. Certains ont des formes tellement évocatrices que leurs noms de baptême se transmettent de génération en génération. Là-bas un éléphant barrit pour l’éternité face à la mer, semblant défier l’eau de venir le submerger. Un peu plus loin, des moines de granit entament une procession.


Les rochers jusqu’alors immergés apparaissent : leur couleur sombre atteste du fait que l’eau est leur demeure la moitié du temps. Si vous n’avez pas froid aux yeux, osez donc en soulever quelques-uns, tout en veillant bien à les remettre strictement à leur place : peut-être aurez-vous la chance de tomber sur un gros crabe qui vous provoquera en duel, toutes pinces dressées.


Le soleil décline, et les îles se découvrent peu à peu : la plupart sont interdites d’accès, car lieux de ponte pour les oiseaux. Certains quittent leurs nids de temps à autre pour effectuer un vol en piqué dans l’eau et ramener un poisson tout frétillant à leurs rejetons.

Mais voilà qu’il est déjà l’heure de rentrer en métropole : pour garder un souvenir de votre éphémère vie insulaire, n’hésitez pas à ramener quelques petits mais néanmoins magnifiques coquillages ramassés sur le sable. Ils résument à eux seuls les îles Chausey : un magnifique ouvrage de la nature, mais qui contient toujours un part de mystère.

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