Thiron-Gardais : un ensemble patrimonial exceptionnel
Dans le Perche traditionnel, ancienne Province de France sous l'Ancien Régime, Thiron-Gardais, 1000 âmes, proche de la localité La Loupe, département de l'Eure-et-Loir, abrite un magnifique ensemble bâti : « Le Domaine de l'Abbaye ».
Il comprend une Grange aux Dîmes, une Église abbatiale et un Collège royal et militaire. Des jardins thématiques de plantes médiévales l'agrémentent (Gardais de Garten, les jardins) ainsi que des vergers et un verger-conservatoire communal de pommes.
Le jeune maire du lieu Victor Provôt, plein d'ambition pour sa ville, cherche à propulser son prestigieux site trop méconnu vers la notoriété. À juste titre. Il préside aujourd'hui l'Association Ordre de Tiron (sans la lettre H, comme au temps des moines).
L'Ordre de Tiron, une Histoire oubliée
Au 12ème siècle, en 1114, un nouvel ordre religieux est créé par Bernard d'Abbeville, charpentier de métier, grand prédicateur auquel on prête aussi des guérisons miraculeuses. Sous son égide, l'ordre a vite pris de l'ampleur et s'est exporté en Europe, surtout en Écosse et au Pays de Galles.
Tiron, l'Abbaye-mère, a pu revendiquer pas moins de 21 Abbayes-filles, des prieurés, des seigneuries obéissant à la règle tironnienne. Les Tironiens créent leurs abbayes en milieu rural, souvent dans des marécages et endroits désertiques peu attractifs. L'Abbaye-mère a compté jusqu'à 300 moines sans compter les frères convers, ces hommes de labeur qui assurent aussi le succès de la communauté. Tout moine tironien, moine-artisan, avait un métier prioritairement dans le secteur du bâtiment. Selon la devise de l'Ordre : « qui ne travaille pas ne mange pas » ! La plupart d'entre eux était maçons, charpentiers, et souvent maîtres de l'hydraulique. Ils ont ont savamment su détourner la rivière Thironne en cœur du village.
Première congrégation à s'installer en milieu rural, cet exil, cet isolement l'a éloignée de la notoriété. A titre de comparaison, Cluny, Abbaye de ville, était davantage connue et plébiscitée par sa localisation plus attractive.
L' imposante Église Abbatiale menace ruine
L'abbaye de la Sainte-Trinité de Tiron a 900 ans d'histoire et fait partie des itinéraires culturels européens labellisés par le Conseil de l'Europe. Elle abrite la seconde plus grande nef du Département d'Eure-et-Loir. 64 mètres de long. Après celle de la Cathédrale de Chartres. Classée en 1912, sa nef est sobre. Aucune ornementation ne peut distraire et détourner le regard des moines, selon les préceptes d’austérité tironniens. Le cloître, détruit à la Révolution, a affaibli l'édifice. Des arcs-boutants en béton ont été posés pour sa sauvegarde.
L'intérieur montre de magnifiques boiseries du 17ème, en bon état, offertes par la Princesse Palatine, épouse de Monsieur, frère du Roi. Les stalles austères en bois du 14è sont classées Monument Historique. Il devient urgent d'assurer la protection des fondations, reconstruire la galerie adossée au cloître par des injections de béton, sous les fondations du mur.
Le Collège Royal et Militaire, un petit chef d’œuvre d'harmonie
C’est aujourd'hui le jardin secret de Stéphane Bern. Au cœur de ce village percheron authentique, l’École et ses jardins, accolés à l'Abbatiale en ruine, ont été rachetés courageusement en 2013 par Stéphane Bern. Selon son vœu, tout a été restauré dans le respect de l'ancienne âme du lieu. Exactement comme le bâtiment est sorti de terre au 18ème siècle. Même les couleurs d'origine des volets et huisseries ont été respectées.
La bâtisse principale abritait autrefois le parloir, la Chambre des enseignants (autres que les moines). Dans les combles, les dortoirs des élèves. La création du Collège remonte au 18ème siècle lorsque le roi Louis XVI a souhaité créer en province des écoles militaires. Il fallait éduquer en qualité les Cadets du Roi issus de familles nobles et non nobles, avant qu'ils n'intègrent l’École Militaire de Paris. Être initié aux différentes disciplines militaires, complétées par des disciplines artistiques et sportives : la danse, la natation... mêler les populations et briser l'arrogance des jeunes nobles. Élèves souvent boursiers issus de familles bourgeoises désargentées. Napoléon Bonaparte a failli y être interne mais sa feuille de route indiquait par erreur ou anomalie administrative : Brienne-le-Château dans l'Aube.
L'école et ses salles de classe, en ruine, ont été savamment restaurées. Dans les anciennes salles de classe, un petit musée abrite quelques objets précieux dont la Crosse des premiers Abbés et pour les nostalgiques du temps passé un iconique : tableau noir et son vieux pupitre d'élève. Les jardins recréés dans l'esprit du 18ème par le talent de Louis Bénech, respectent la structure des jardins d'origine. Quelques Arbres Remarquables dont un Tilleul Révolutionnaire, planté à la Révolution ! Il porte encore beau malgré le poids des ans.
Pour aller plus loin :
Le Domaine de l'Abbaye
Le Collège Royal et Militaire
La Mairie de Thiron-Gardais
Tout savoir sur l'Ordre de Tiron
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